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En choisissant le nom de Caran d’Ache (de "karandach" qui en russe veut dire crayon), Emmanuel Poiré fait doublement allusion à ses origines franco-russe et à son amour du dessin.
Petit-fils de grenadier laissé pour mort sur le champ de bataille de la Moscowa, et recueilli par une famille polonaise dont il épousera la fille, Caran d’Ache va très tôt manifester son goût pour la peinture militaire. Prestige de l’uniforme s’impose. Ce mondain acidulé trouvait là le goût de l’uniforme qu’il partageait avec les soubrettes, dont il est dit qu’il était par ailleurs fort amateur.
Inventeur, ou presque, du dessin sans légende, il use d’un trait net, précis, qui circonscrit ses personnages, et donne une grande évidence à ses histoires. D’où l’inutilité des légendes. C’est une vision très moderne. Caran d’Ache est une sorte de précurseur de la bande dessinnée.
Admiré par Alexandre III, qui collectionnait ses dessins, il n’est pas étranger, dit la légende, au rapprochement franco-russe dont Guillaume II (cible favorite de Caran d’Ache) fit les frais.Pour Rodolphe Salis et son célèbre cabaret montmartrois du Chat Noir, il va créer un théâtre d’ombre pour narrer l’Épopée de Napoléon. Tout Paris va s’émerveiller devant un spectacle, qui est resté parmi les grands moments du Paris by night fin de siècle.
Féroce autant que talentueux, Caran d’Ache va également dénoncer les grands scandales de la Belle Epoque et créer un journal Psst ! qui fut une sorte de gazette à sensation, support de sa verve inépuisable. Son œuvre graphique dispersée dans les publications de l’époque restait d’accès difficile. Voici l’occasion de la mieux connaître et de l’apprécier à sa juste valeur.